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Sangre
De : Amat Escalante Avec : Cirilo Recio, Laura Saldana, Claudia Orozco
Sortie France le : mercredi 1 février 2006
Mexique, 1h30, 2005.
Sélection Un Certain regard au Festival de Cannes 2005. Prix Fipresci.
Un film dur mais nécessaire qui souligne l’absurdité de ces vies ordinaires dépourvues de sens et d’espérance. |
La misère n’a parfois rien à voir avec l’argent, comme la pauvreté peut être affective ou intellectuelle. Sangre en est la preuve accablante et, il vaut mieux prévenir tout de suite, le film est si sordide qu’il est à déconseiller aux adolescents et aux spectateurs qui cherchent juste un film pour passer un bon moment !
Toutes les images du film respirent cette détresse humaine. Dans un appartement insipide et si triste que tous les meubles ont l’air en Formica, évolue un couple dont la vie quotidienne va vite mettre mal à l’aise le spectateur. La joie, la tendresse et l’espérance semblent ne pas exister ici. Monsieur repose sa bedaine allongé sur le divan, face à la télévision et à une overdose de telenovellas : nous sommes au Mexique mais les mêmes émissions existent partout dans le monde. Madame fait tout pour se simplifier la vie et y enlever jusqu’au moindre soupçon de plaisir. Que ce soit dans la cuisine, l’accouplement ou le travail, tout pour elle est régi par la même mécanique consternante du fast-food : le vite, l’insipide et le pratique qui fait le moins de saletés possible. Que ces trois activités soient consommées dans un même lieu, toujours avec ce souci de déprimante simplification, ne semble gêner aucun des protagonistes.
On comprend vite qu’on touche là le point zéro du vivant, l’aberration de la civilisation et du consumérisme. Le siècle des Lumières et sa cohorte de philosophes ont dû s’égarer dans le cours de l’Histoire, quelque part entre les débuts du capitalisme et la fin de l’âge de bronze. Ces gens-là ont de quoi manger, un travail, un toit pour s’abriter et un partenaire. Mais ils vivent dans un tel dénuement affectif, intellectuel et spirituel qu’on se demande ce qu’ils ont encore d’humain. Rien est-on tenté de répondre lorsque la vie vient frapper à leur porte. Ils réagissent alors avec tant de peur, d’absurdité et de bêtise méchante que tout soupçon d’espérance est directement jeté à la poubelle.
Le réalisateur Amat Escalante dresse le constant effarant d’une humanité en pleine mutation, retranchée dans son intérieur/intimité impénétrable, au sens propre comme au figuré, gavée des pires produits de l’art culinaire et de la télévision qui laminent le corps et le cerveau, dans une absence assourdissante de sens. Sangre est une gifle salutaire contre le ronronnement de nos bonnes consciences.
Magali Van Reeth |
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