Odessa... Odessa !
De : Michale Boganim Sortie France le : mercredi 17 août 2005
Israël/France, 2004, 1h42
Documentaire, sélection officielle au festival de Sundance, prix CICAE au festival de Berlin, meilleur réalisateur au festival de Jérusalem.
Magnifique documentaire, à travers trois pays et trois villes, de ces communautés poussées à l’exil et de leur façon bien différente de vivre le souvenir et la nostalgie. |
Film sur la nostalgie et sur l’exil, Odessa est un film douloureusement beau qui parle de ces êtres entre deux mondes, entre deux eaux, entre deux rêves. Film sur la nostalgie parce qu’on y croise sans cesse des personnages qui regrettent le temps passé, que ce soit leur jeunesse, leur ville natale, leur pays d’origine. Aujourd’hui qu’ils ne sont plus que des personnes âgées, tout leur parait mieux que le temps présent qu’ils ont du mal à comprendre. Film sur l’exil car, comme le disent les protagonistes « Là-bas, on était juif, ici on est russe ». Donc toujours autre.
Michale Boganim est une jeune réalisatrice et Odessa est son premier documentaire. Il a remporté de nombreux prix dans les festivals où il a été présenté. Elle dit avoir été impressionnée par la lecture des Contes d’Odessa d’Isaac Babel. Elle a donc filmé une sorte de triptyque en trois villes : Odessa la Russe, Brighton l’Américaine et Ashdod l’Israélienne. A chaque fois, une atmosphère différente. A Odessa, quelques vieilles femmes, un peu sorcières et pathétiques, qui vivent dans un quartier en ruine et parlent yiddish entre elles. Elles se retrouvent après la sieste pour chanter d’une voix éraillée en rêvant du temps où elles étaient actrices. A Brighton, une communauté russe de réfugiés, qui ne parlent que russe, mais s’habille de tee-shirts, de chemises et même de maillots de bain aux couleurs du drapeau américain. L’ambiance est joyeuse, on chante beaucoup, on bénit Dieu d’avoir fait l’Amérique si prospère pour vivre de l’aide sociale sans rien avoir à faire. En arrière plan, quelques vieux Juifs new-yorkais râlent ferme en parlant de ces gens qui « ne vont à la synagogue que si on les paye ». A Ashdod, la chaleur est étouffante et le quotidien est parfois difficile entre les petits boulots de balayeurs et les différentes communautés, Russes, Marocains, Ethiopiens ou Géorgiens, qui ne s’aiment pas. Mais on y trouve la bible en russe, de la vodka et on peut toujours chanter en jouant aux dominos.
Avec finesse, Michale Boganim accompagne des hommes et des femmes qui bientôt ne seront plus que des souvenirs car leurs petits-enfants seront, eux, de véritables Américains ou de véritables Israéliens, ne parlant ni russe ni yiddish et ayant oublié pourquoi leurs ancêtres sont partis. Au-delà du portrait d’une communauté religieuse ou d’une ville, Odessa dit la difficulté de partir et celle de rester. Le sort de tous les êtres humains, depuis des temps immémoriaux.
Magali Van Reeth |
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