La trahison
De : Philippe Faucon Avec : Vincent Martinez, Cyril Troley, Ahmed Berrhama
Sortie France le : mercredi 25 janvier 2006
France, 2005, 1h20.
Un film très pudique sur la guerre d’Algérie qui nous mène au cœur des tourments vécus par les Algériens qui servaient dans l’armée française. |
La guerre d’Algérie reste un sujet douloureux dans la société française et ce nouveau film de Philippe Faucon risque de déplaire à certains, autant qu’il pourra plaire à d’autres. Si on essaye de dépasser les questions politiques et historiques, il reste un film, c’est-à-dire une fiction, une création artistique où le réalisateur fait des choix et met en avant ses convictions personnelles. A ce titre, La trahison est une très belle réussite.
La guerre est une histoire d’hommes, toujours douloureuse. Philippe Faucon ne tente pas un seul instant de nous la faire avaler avec une histoire d’amour, un romantisme déplacé ou des scènes d’horreur racoleuses. Le cœur du film est la situation de ces Algériens enrôlés dans l’armée française pour se battre contre leurs concitoyens qui veulent l’indépendance. Pas un instant Philippe Faucon ne s’éloignera de son sujet. Rien sur les origines de cette guerre, rien sur sa justification, son déroulement. La trahison décrit le plus froidement possible le quotidien d’une section française dans la campagne algérienne dont quatre membres sont des « musulmans », pour utiliser le terme politiquement correct de l’époque (comme quoi même le politiquement correct change à toute allure…).
A sa tête, un jeune lieutenant français, dont rien ne permet de dire de quel milieu il est issu, pourquoi il est là, s’il est appelé ou non. On voit juste qu’il essaye de faire son boulot le mieux possible, sans violence inutile, sans trop d’état d’âme non plus. La trahison, c’est avant tout le regard que ces quatre musulmans portent sur eux-même et leur fonction. Au début du film, ils sont tout à fait convaincus d’être là où il faut, à leur juste place. Le regard que leur renvoie leurs compatriotes et les soldats français va peu à peu nous faire comprendre leurs doutes.
La réussite du film de Philippe Faucon tient à la façon dont il maîtrise de bout en bout son sujet, avec pudeur, pour un rendu tout en légèreté. Légèreté des apparences qui donne au film sa grande pertinence. La torture est à peine entrevue, l’émotion tenue à distance, les grands discours inexistants. La trahison peut nous permettre alors, à nous spectateurs, de rentrer pleinement dans la douloureuse ambiguïté de ces jeunes gens. Ils sont Algériens mais ils sont avant tout des hommes dont nous partageons les tourments sur la fidélité et la trahison.
Magali Van Reeth |
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