Terre et cendres
De : Atiq Rahimi Avec : Abdul Ghani et Jawan Mard Homayoun
Sortie France le : mercredi 5 janvier 2005
Afghanistan/France, 2003, 1h45
Sélection Festival de Cannes 2004, Un certain regard.
Sortie en France le 5 janvier 2005.
Très beau film à contempler comme un long poème triste, où tous les personnages, malgré leurs souffrances, peuvent trouver un souffle d’espérance. |
Ce film est précieux parce qu’il le premier film réalisé par un Afghan, dans son pays, depuis la fin de la guerre contre les Talibans. Mais il est surtout précieux par les grandes qualités artistiques dont Atiq Rahimi fait preuve pour un premier long métrage. Bien sûr, les paysages des montagnes du nord de l’Afghanistan ont une beauté sidérante mais encore faut il savoir les filmer avec la lumière particulière qui fait ressortir en même temps la magnificence de la nature et la désolation humaine. Tout le film d’ailleurs est sans cesse en équilibre : entre beauté et misère, entre deuil et vie, entre colère et louange. Equilibre fragile mais si bien maîtrisé, si éphémère et si puissant à la fois que le spectateur est plongé dans une ambiance rare de ravissement presque douloureux.
A l’ombre d’un pont de pierre, sous lequel plus aucune rivière ne coule, un vieil homme assis attend, brisé par l’âge et la détresse. Derrière lui, la carcasse métallique d’un char abandonné et un petit garçon qui chantonne avec insouciance. A gauche du pont, un tout petit commerce tenu par un homme qui devait avoir une vocation d’ermite ou de prophète. A droite, un poste de contrôle, tout aussi minuscule, pour surveiller une route, de ces routes où on comprend tout de suite que rien ne passe, hormis le temps et le malheur. En arrière plan, la silhouette noire d’une femme perdue dans l’ombre de ses voiles.
Ecrasé par la lumière, la faim et l’attente, le vieil homme immobile combat les démons de ses souvenirs. La peur, le chagrin, la honte et le doute résonnent dans le vide de sa vie. De temps à autre, l’enfant le tire par la manche et le ramène au carrefour désastreux du présent.
Terre et cendres se regarde comme un poème somptueux, triste et beau mais où l’espérance est toujours possible. Poésie des paysages, des mots dits pour calmer la faim et la douleur, des gestes de partage malgré tant de dénuement. Pour son premier film, Atiq Rahimi montre une écriture personnelle, somptueuse dans les décors naturels et épurée dans le scénario. Il dit avec pudeur les cicatrices de son pays, le fragile compromis entre passé et avenir et cette infime parcelle d’espérance qu’on peut trouver jusque dans le ventre des machines de guerre rouillées.
Magali Van Reeth |
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